CONGRES DEMOCRATIQUE AFRICAIN – CDA
Isangano Nyafurika Riharanira Demokarasi
AFRICAN DEMOCRATIC CONGRESS – ADC
Boîte Postale 22 B-1080 Molenbeek 5, Belgique
COMMUNIQUE DE PRESSE
Bruxelles, le 23 mars 1999
RWANDA : La Révolution sociale de 1959 face à la Terreur du Régent.
La Révolution française de 1789 a connu sa Terreur blanche, sa Restauration et sa Monarchie de Juillet pour triompher définitivement en 1848 avec la proclamation de la République. L’histoire bégaierait-elle et serions-nous en train d’assister à l’exécution de la même partition en ce qui concerne le Rwanda ? Le Régent du pouvoir, le Général Kagame, dont la terreur est arrivée à son point culminant avec ses crimes contre l’humanité, ses procès, ses emprisonnements, son quadrillage militaire du pays et ses invasions extérieures, voudrait-il piétiner des pans entiers de l’histoire du pays et effacer les conquêtes d’égalité, d’accès à la propriété privée et de liberté de la Révolution rwandaise de 1959 pour établir la restauration d’une aristocratie militaire et fasciste d’un autre âge ?
Le Congrès Démocratique Africain – CDA – ne peut pas ne pas réprouver profondément la dérive actuelle du régime de Kigali quand nous prenons connaissance que des projets de réécriture de l’histoire sont en cours et que des personnalités, y compris celles qui l’ont aidé à prendre le pouvoir par les armes, sont jetées en prison pour le seul fait d’avoir pris part à la Révolution rwandaise. Le CDA ne peut pas ne pas dénoncer fortement le discours politique qui, aujourd’hui, avec une vigueur arrogante et un révisionnisme méprisant, proscrit le mot révolution, radie des institutions publiques, bannit et incarcère toute personne qui se réclame de son héritage ou soupçonné comme tel. Si le CDA peut comprendre l’amertume endurée par quiconque rentrerait d’un long et éprouvant exil, il condamne par contre avec énergie, que, pour se venger de l’éviction passée du pouvoir, les acquis aussi précieux d’un peuple, arrachés de haute lutte, soient qualifiés de génocide. Un tel comportement présage malheureusement de craindre que la tragédie des rwandais n’aurait pas encore connu de fond et que le pouvoir politique préparerait un bain de sang, sa « Terreur blanche ».
La Révolution sociale de 1959 a apporté des acquis et des espérances fondamentaux à de larges couches de la population rwandaise, particulièrement les tutsi et les hutu de conditions modestes qui subissaient l’arbitraire et la cruauté d’un régime féodal de fer. Elle a véhiculé des revendications fortes d’égalité, de justice sociale, de liberté, de reconnaissance de la propriété privée au nom desquelles le CDA lutte pour la démocratie et condamne le génocide rwandais et les crimes contre l’humanité commis au Rwanda et dans la République Démocratique du Congo. Remettre en cause des valeurs fortes dans lesquelles de nombreux rwandais se reconnaissent, revient à rompre définitivement l’espoir de réconciliation et déchaîner les chiens de la violence, du désespoir et du racisme. Les remettre en cause, c’est ouvrir la voie royale à la restauration des privilèges à une caste minoritaire de militaires et d’hommes d’affaires extrémistes aujourd’hui au pouvoir et engluée dans la corruption, le non droit et le crime politique.
Pour le CDA, que les conquêtes de 1959 aient été plus tard dévoyées par des politiciens ethnistes ou régionalistes (1963, 1973, 1990, 1994, 1995 -1999) pour se hisser ou se maintenir au pouvoir, cela n’enlève rien à leur nature émancipatrice et en la croyance forte par la population dans les idéaux véhiculés. Cela montre au contraire qu’un pouvoir non contrôlé par les citoyens court des risques forts de ne pas se trouver en phase avec ces derniers, lesquels il prétend représenter. Cela est une preuve supplémentaire que, laissée à sa seule ivresse, la classe politique peut corrompre les institutions, les détourner à son seul profit et commettre l’irréparable. Et elle l’a commis, le génocide. D’où l’extrême urgence d’instaurer des institutions démocratiques assises sur la participation et le contrôle citoyens.
La Révolution de 1959, rappelons-le et l’affirmons-nous, a été l’œuvre d’une majorité de Rwandais, hutu et tutsi de conditions modestes, considérées comme des êtres de seconde zone, qui luttaient avant tout pour sortir du servage et accéder à leur émancipation politique et sociale. On comprend mieux maintenant pourquoi le FPR, organisation de réfugiés, participant à l’activation de la fibre ethnique, abattant l’avion présidentiel, reprenant unilatéralement la guerre le 6 avril 1994, sommant deux jours après les troupes étrangères de déguerpir dans les meilleurs délais sous peine d’être traitées comme des ennemis, a sciemment exposé les tutsi de l’intérieur au génocide et l’opposition démocratique aux massacres.
Pour cette organisation politique, les gens de l’intérieur, toutes ethnies confondues, ayant choisi de vivre les structures fondamentales de la révolution à la base de l’exil, devaient en supporter le prix fatal. Il est vrai, en effet, en ce qui concerne particulièrement les tutsi, que malgré les drames qu’ils ont endurés en termes de représailles lors des attaques armées des réfugiés de 1962 à 1967, ils sont restés fidèles aux institutions émanant de la révolution qui a mis un terme à la féodalité. Si le CDA condamne fermement le génocide tutsi commis par l’ancien régime, c’est aussi parce qu’il réprouve totalement le racisme à la base et le reniement aux tutsi le legs légitime des idéaux d’humanité de la révolution à laquelle ils ont eux-mêmes œuvré.
Aujourd’hui encore les rescapés tutsi sont taxés de collaboration avec les régimes « hutu » et doivent justifier à leurs « libérateurs » les raisons et les mobiles de leur survie au génocide. Ceux qui semblent s’en tirer le mieux sont ceux qui se constituent en délateurs contre les justes qui les ont sauvés. Les autres se taisent, ne peuvent témoigner des solidarités qui les ont tirés de la mort certaine, à cause du péché de complicité qui leur colle sur la peau. Le plus cynique, le plus incroyable est l’exploitation politique du génocide par le FPR alors qu’il connaît bien la casse présentée comme nécessaire qu’il a opérée en vue de « faire de l’omelette », ainsi qu’il le confiait en 1994 aux différents diplomates à Kigali, lesquels le dissuadaient de reprendre la guerre. Alors, après toutes les affres commises, au non de quoi le FPR revendique-t-il l’héritage du génocide ?
Le CDA n’acceptera jamais qu’à cause de l’imposition soudaine de la violence armée pour arriver au pouvoir, le nouveau régime rwandais occulte sa responsabilité flagrante dans les crimes contre l’humanité qui se sont abattus sur le peuple rwandais. Il demandera toujours à ce que, pour une question de justice et d’équité, comme il le fait déjà en ce qui concerne les bergers du génocide tutsi, le Tribunal pénal international d’Arusha, par sa compétence temporelle, juge également les auteurs au sein du FPR qui se sont rendus coupables de crimes contre l’humanité. Le CDA n’acceptera jamais qu’une clique de nostalgiques de l’aristocratie féodale, qui s’opposa en 1959 à ce que le pouvoir à l’époque évolue en monarchie constitutionnelle, foule ensuite aux pieds l’histoire et la mémoire des rwandais qui reconnaissent la Révolution sociale comme une avancée essentielle de la vie politique et sociale de la nation.
Et, puisqu’il faut rechercher les origines de l’idéologie génocide qui a inspiré aussi bien l’ancien régime que le nouveau à commettre l’irrémédiable, il convient de reculer dans le temps et tourner les yeux vers l’histoire récente des massacres de Rucunshu où la lignée « nyiginya », fut systématiquement décimée par le Régent Kabare, – encore un régent -, pour se hisser au pouvoir et opérer un coup d’Etat qualifié de biologique, tellement les plans sordides qui précédèrent et suivirent les massacres et le coup de force étaient d’une infinie perfidie. Ils n’ont de comparaison que les tueries qui se sont déroulées dès 1994 et se révèlent comme de parfaits clones. Le coup d’Etat de Rucunshu, non seulement perturba les équilibres institutionnels de l’ordre monarchique jamais recouvrés, mais surtout introduisit dans les mœurs politiques l’idéologie de l’extermination systématique, en masse, pour le seul fait de l’appartenance d’un individu à un groupe social ou clanique.
Les graines de la liberté et de l’égalité ont été semées, elles ont des racines indéboulonnables, elles germent et résisteront contre le machiavélisme le plus sagace. Prenez garde ! Et nous prenons les rwandais et l’opinion internationale à témoin. Plus vous enfouissez l’histoire et la mémoire des peuples, plus profond la conscience se cultive et plus haut elles se déterrent et rebondissent avec plus d’éclats et de vigueur.
Pour le Congrès Démocratique Africain
Jean Baptiste NKULIYINGOMA
Chargé de l’information.
Note:
Le Congrès Démocratique Africain-CDA est devenu ensuite l’Alliance Démocratique Rwandaise-ADR, pour fonder enfin, avec l’Union des Forces Démocratiques rwandaises-UFDR (RDR+FRD), les Forces Démocratiques Unifiées-FDU-Inkingi. Ce communiqué reste d’actualité, aujourd’hui que la clique au pouvoir à Kigali, 14 ans après, veut recycler son discours, lequel cherche à présenter la Révolution Sociale de 1959 comme un génocide. Dr. Nkiko Nsengimana, ancien Coordinateur du Congrès Démocratique Africain-CDA, aujourd’hui Coordinateur des Forces Démocratiques Unifiées-FDU-Inkingi.
CDA_COMMUNIQUE_REVOLUTION
29Déc