Kigali, le 16 avril 2012
Suite à une intimidation continue de témoins de la défense, la leader de l’opposition Mme Victoire Ingabire Umuhoza, Présidente des FDU-Inkingi, a notifié la Haute Cour de Kigali qu’elle a définitivement perdu toute confiance dans ce simulacre de procès et que desormais, elle allait boycotter toutes les audiences à venir. Elle a demandé à ses avocats de se conformer à sa décision et de rester en dehors de ce cirque malheureux. Les procureurs ont déclaré au tribunal que l’intimidation présumée des témoins de la défense n’était pas une raison suffisante pour se retirer, et que Mme Ingabire devrait être contrainte à comparaître, même si elle persistait à boycotter. Se référant à la jurisprudence et à des règles de procédure sur les décisions rendues dans le cas du TPIR contre Barayagwiza à Arusha, ils ont suggéré qu’un nouvel avocat commis d’office serait désigné pour “procédure en absence”. La décision de la Cour sur le refus d’assister à des audiences du procès est attendue le 18 Avril 2012.
Kigali, 16 April 2012
Following continuing intimidation of defense witnesses, the opposition leader Madame Victoire Ingabire Umuhoza, FDU – Inkingi Chair, told today the High Court that she has irrevocably lost trust in this show trial and that subsequently she will boycott all the next hearings. She instructed her defense counsel to abide by her decision and stay away from this unfortunate circus. The prosecutors told the court that the alleged intimidation of defense witnesses is not enough reason to withdraw, and that she should be produced in court even if she persists to boycott. Referring to the jurisprudence and rules of procedure on decisions rendered in the case ICTR v. Barayagwiza in Arusha, they suggested that a new counsel be designated for “in absentia proceedings”. The Court ruling on the issue of the refusal to attend the trial proceedings is due on 18 April 2012.
Avant cette impasse, le tribunal a refusé d’entendre le témoin de la défense Michel Habimana, sur des allégations d’intimidation et lui a ordonné de sortir du palais de justice. L’avocat de la défense, le bâtonnier Gatera Gashabana, a insisté sur le fait que l’intimidation et les menaces allaient faire peur à tous leurs témoins au cas où la Haute Cour rejeterait le principe de recourir à la loi pour y remédier.
Madame Victoire Ingabire Umuhoza a expliqué que cette situation a atteint un point de non-retour et qu’un procès équitable n’était plus possible dans ces conditions. “Je suis accusée de crimes terribles, mes témoins sont intimidés et le tribunal s’en fiche”. Elle a exposé les failles depuis le début de cette mascarade, avant d’annoncer qu’elle se retirait avec effet immédiat:
- Interférences directes dans ce procès par le président Paul Kagame, des ministres et autres responsables gouvernementaux en vue de maintenir une main haute sur l’issue du procés et de piétiner les règles de procédure judiciaire;
- Intimidation et harcèlement des témoins de la défense;
- “Le 8 Avril 2011, j’ai été emmenée à une réunion secrète à huis clos dans le bureau du Procureur Général Martin Ngoga qui m’a dit que j’avais été arrêtée parce que j’avais provoqué une impasse politique avec le gouvernement, alléguant que nous étions en train de promouvoir un nouveau régime hutu parce que moi et mon parti accusions le FPR de crimes contre des populations hutu. Suite à ces discussions privées, le 13 mai 2011, j’ai envoyé une lettre de 9 pages au Procureur Général en expliquant ma position sur ces problèmes cruciaux et la façon dont je pense que le pays doit être gouverné d’une manière qui rassure tout le monde. J’ai écrit nonobstant tout ce qui pouvait arriver, cette lutte ne serait jamais oublié dans le processus révolutionnaire visant le changement de gouvernance dans notre pays lancé depuis 2010. Que je meurs ou vive, que je sois détenue ou libérée, le fruit de notre travail ne serait jamais effacé. La portée de ce mouvement va plus loin que mon humble personne. Je lui ai conseillé de libérer tous les prisonniers politiques, d’ouvrir l’espace politique et d’entamer un dialogue entre le régime et son opposition. Il m’a dit qu’ils s’attendaient à ce que je leur présente des excuses en échange d’un pardon gouvernemental pour des infractions contenues dans l’acte d’accusation … », a-t-elle dit.
- Au cours de ce procès, de nombreuses fois mes avocats ont été privés du droit de contre-interroger les témoins du procureur et même du droit de parler;
- Le principe de la non-rétroactivité de la loi pénale rwandaise et le problème de compétence légale ou territoriale pour juger certains faits ont été violés par cette cour.La Haute Courrefuse d’exclure des éléments antérieurs à la promulgation de la loi N° 45/2008 du 9 septembre 2008 sur la lutte contre le terrorisme, la loi N° 47/2001 du 18 décembre 2001 relative à la prévention, l’élimination et la répression du crime de discrimination et le sectarisme; et de la loi N° 18/2008 du 23 juillet 2008 sur l’idéologie du génocide. Il se trouve beaucoup de tels documents dans le dossier du Procureur qui ne peuvent pas constituer de preuve d’une responsabilité pénale selon les lois en vigueur au Rwanda.La Haute Courva même au-delà de sa compétence territoriale sur certaines accusations en ordonnant à l’accusée de présenter ses moyens de défense sur des faits contestés.
- Le tribunal affiche une partialité visible en faveur du ministère public au détriment de la vérité. Cette attitude est contraire au principe d’équité. Les abus de procédures et de fonds qui ont marqué ce procès depuis son ouverture sont à l’origine d’une injustice massive et d’une frustration judiciaire inacceptable. «Il s’agit d’un simulacre de procès politique, la défense et le parquet ne sont pas à armes égales devant le tribunal, mes droits sont constamment violés. Je tiens humblement à informer cette honorable cour que je me retire de ce processus vicié », a déclaré Mme Victoire Ingabire.
Un des ses avocats, Barrister Iain Edwards, qui n’était pas présent à l’audience a dit au téléphone “qu’il était temps de quitter cette folie de parodie de justice. Selon la loi rwandaise, nous (la défense) nous retiront automatiquement des plaidoiries devant la Haute Cour, mais continuerons à défendre la cliente sur sa pétition auprès de la Cour Suprême sur la révision constitutionnelle des lois controversées du genocide”.
La Haute Cour rendra son verdict sur la continuité du procès et les règles de procédure en absence, ce 18 avril 2012, à 11h00.
FDU-INKINGI
Boniface Twagirimana
Vice-président intérimaire
Before this impasse, the court refused to hear the defense witness Michel Habimana on allegations of intimidation and ordered him out of the courthouse. The defense lawyer, Batonnier Gatera Gashabana, insisted that the intimidation and threats will scare away all their witnesses should the High Court slams the principle to resort to the law for remedy.
Madame Victoire Ingabire Umuhoza explained that this situation has reached a non-return point and that a fair trial was not possible anymore in those conditions. “I am accused of terrible crimes, my witnesses are intimidated and the court does not care”. She exposed the flaws since the inception of this masquerade, before she announced that she was withdrawing with immediate effect:
- Obvious interferences in this trial by President Paul Kagame, Cabinet Ministers and other governmental officials trying to keep a hold upon and circumvent the outcome of the proceedings;
- Intimidation, harassment of defense witnesses;
- “On April 8, 2011 I was taken to a closed door secret meeting in the office of the Prosecutor General Martin Ngoga who told me that I was arrested because I have caused a political stand-off with the government alleging that we are promoting a new Hutu rule because I and my party are accusing RPF of crimes against the Hutu populations. Further to those private discussions on May 13, 2011 I sent a 9-page letter to the Prosecutor General explaining my position on these crucial problems and the way I think the country should be governed in a way that assures everybody. I wrote that whatever may happen, this struggle will no be forgotten in the revolution aimed at changing the country’s governance that was launched in 2010. Shall I die or live, be detained or freed, what we have achieved will never go back. This movement is even stronger than myself. I advised him to free all political prisoners, to open up the political space and to start a dialogue between the regime and its opposition. He told me that they expected apologies in exchange of a governmental pardon unto alleged offenses in the indictment …”, she said.
- During this trial, for many times my lawyers have been deprived of the right to cross-examine the prosecutor’s witnesses and even the right to speak;
- The principle of non-retroactivity of criminal law and the lack of jurisdiction to try some charges have been violated by this court. The High Court refuses to exclude materials predating the publications of the Law N° 45/2008 of 9 September 2008 on Counter Terrorism; Law N° 47/2001 of 18 December 2001 on Prevention, Suppression and Punishment of the Crime of Discrimination and Sectarianism; and the Law N° 18/2008 of 23 July 2008 on genocide ideology. There are numerous such documents in the Prosecutor’s dossier which cannot amount to evidence of criminal liability under Rwandan laws. The High Court went beyond its territorial jurisdiction on some charges and ordered the accused to defend herself on them.
- The court has been siding too closely with the prosecution instead of considering the truth. This has rendered impossible all chances for any meaningful fairness. The abuse of process has prevailed since the beginning of this process causing massive unfairness and frustration.
“This is a political show trial, the field is not leveled, my rights are constantly violated. I humbly inform this honorable court that I withdraw from this flawed process”, said Madame Victoire Ingabire.
Defense Barrister Iain Edwards who was not in court said on phone “it was time to quit this foolishness and travesty of justice. According to the Rwandan law, we (the defense) automatically withdraw from the High Court process but will continue to defend her Supreme Court petition on constitutional review of contentious genocide laws”.
The High court will issue its decision on the continuity and the rules of in absentia procedure on 18 April 2012, 11:00.
FDU-INKINGI
Boniface Twagirimana
Interim Vice President